vendredi, janvier 31, 2025
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Ressources hydriques : le plan ambitieux du Maroc

Ressources hydriques : le plan ambitieux du Maroc

Face à l’augmentation de la pression sur ses ressources en eau, le Maroc intensifie ses efforts pour répondre à ses besoins croissants et met en place une série de solutions novatrices. Le ministre de l’Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural, des Eaux et Forêts, Ahmed El Bouari, a récemment annoncé un programme ambitieux visant à construire des stations de dessalement d’eau de mer, conformément aux orientations royales. L’objectif de ce programme est de produire plus de 1,7 milliard de mètres cubes d’eau dessalée d’ici 2030, afin de garantir un approvisionnement durable pour l’ensemble du pays.

Ce programme, détaillé par le ministre lors d’une séance de questions orales à la Chambre des représentants, a pour vocation de renforcer l’approvisionnement en eau potable des villes côtières et de soulager les ressources en eau traditionnelles, notamment pour l’agriculture. Ces nouvelles infrastructures auront un impact majeur sur plusieurs régions particulièrement touchées par la pénurie d’eau. Le Maroc, pays caractérisé par une faible disponibilité en eau douce, mise donc sur ces projets d’envergure pour faire face à la demande de plus en plus forte.

Les projets phares du programme de dessalement
Parmi les projets les plus significatifs, la station de dessalement de Dakhla, dont les travaux sont déjà bien avancés (environ 70 %), affichera une capacité de 37 millions de mètres cubes d’eau dessalée par an. Cette station, qui fait partie du Plan national de gestion de l’eau, permettra de répondre aux besoins de la région, en particulier en matière d’eau potable et d’irrigation. La ville de Dakhla, située dans le sud du Maroc, souffre depuis longtemps d’un accès limité aux ressources en eau, ce projet est donc d’une importance capitale.
Dans le cadre de ce programme, les villes de Casablanca et de la région de l’Oriental bénéficieront chacune d’une station de dessalement d’une capacité de 300 millions de mètres cubes par an, répartis entre l’alimentation en eau potable et l’irrigation agricole. Ces stations permettront d’assurer un approvisionnement régulier en eau, non seulement pour la consommation domestique, mais aussi pour l’irrigation des terres agricoles, secteur essentiel à l’économie du pays.
Tanger et Rabat, deux grandes métropoles marocaines, ne sont pas en reste. Tanger disposera d’une station capable de produire 150 millions de mètres cubes d’eau dessalée par an, tandis que la capitale administrative, Rabat, verra une station de 300 millions de mètres cubes. Ces stations seront principalement dédiées à l’alimentation en eau potable, mais pourront également répondre à des besoins agricoles secondaires.

Les régions agricoles bénéficiaires
Les régions agricoles du Maroc, qui représentent un pilier essentiel de l’économie nationale, ne seront pas oubliées dans ce programme. D’autres stations d’envergure, d’une capacité de 300 millions de mètres cubes chacune, seront installées dans les zones de Oum Errabia et Tensift, afin d’irriguer les terres agricoles des régions de Doukkala, Abda, Haouz et Tensift. Ces projets sont d’autant plus importants que ces zones sont particulièrement dépendantes des ressources en eau pour l’agriculture, un secteur clé du développement économique du pays.
La région de Souss-Massa, également un centre agricole majeur du pays, bénéficiera d’une station d’une capacité de 350 millions de mètres cubes par an, dont 250 millions seront dédiés à l’irrigation des terres agricoles. Cette mesure permettra de soutenir les cultures maraîchères et fruitières, très dépendantes de l’irrigation, particulièrement dans cette région aride.

Les stations de taille moyenne et l’extension du réseau
En plus de ces grandes stations, plusieurs stations de dessalement de taille moyenne seront installées à Guelmim, Boujdour, Tan-Tan et dans d’autres localités du pays. Ces stations seront spécifiquement conçues pour répondre aux besoins locaux en eau potable, et permettront de mieux gérer l’approvisionnement dans ces régions éloignées et moins urbanisées.

Les « autoroutes de l’eau » : un réseau national intégré
Au-delà des stations de dessalement, le Maroc met en place des « autoroutes de l’eau », des liaisons entre les différents bassins hydriques du pays, afin d’assurer une gestion plus efficace des ressources en eau. Ces infrastructures permettront de transférer l’eau entre les régions, en fonction des besoins. Le raccordement entre les bassins de Sebou et de Bouregreg a déjà permis de transférer plus de 580 millions de mètres cubes d’eau, contribuant ainsi à approvisionner plusieurs villes et à soutenir l’agriculture dans les zones bénéficiaires.
Par ailleurs, le projet de raccordement entre les barrages d’Oued El Makhazine et Dar Khrofa, actuellement en phase finale de travaux, permettra d’alimenter la ville de Tanger en eau potable à hauteur de 100 millions de mètres cubes par an. En outre, ce transfert d’eau permettra d’irriguer environ 21 000 hectares de terres agricoles à Dar Khrofa, dans la région de la vallée du Loukkos, contribuant ainsi à augmenter les rendements agricoles.

Le raccordement de Jorf Lasfar à Dourat
Dans le cadre de l’extension du réseau de dessalement, un autre projet stratégique verra bientôt le jour : le raccordement de la station de dessalement de Jorf Lasfar à celle de Dourat. Ce projet, prévu pour être achevé dans un délai de six mois, assurera l’approvisionnement en eau potable du sud de Casablanca, une zone à forte densité de population. Cette initiative garantira un approvisionnement stable et suffisant pour cette région en forte croissance, réduisant ainsi la pression sur les ressources en eau locales.

Un programme d’envergure pour l’avenir
Ce programme de dessalement d’eau de mer, combiné aux « autoroutes de l’eau », s’inscrit dans une démarche à long terme pour assurer la gestion durable des ressources en eau du Maroc. L’enjeu est crucial, car le pays, confronté à des périodes de sécheresse de plus en plus longues, ne peut plus compter uniquement sur ses ressources en eau douce traditionnelles. Le dessalement, bien qu’onéreux, est devenu une solution incontournable pour garantir l’accès à l’eau pour la population, l’agriculture et l’industrie.
Le Maroc entend ainsi renforcer son autonomie en matière de gestion de l’eau, tout en répondant aux défis liés à la croissance démographique et au changement climatique. Si ces projets sont menés à bien, ils offriront un avenir plus sécurisé pour les générations à venir, avec des ressources en eau gérées de manière plus efficace et plus équitable à travers tout le pays.