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Condamnée à rembourser un crédit… qu’elle n’a jamais touché !

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Crédit détourné par une notaire : une cliente condamnée à rembourser un prêt jamais perçu

Une affaire judiciaire glaçante secoue le secteur bancaire et notarial marocain : une cliente se retrouve condamnée à rembourser un crédit immobilier qu’elle n’a jamais touché, après la disparition des fonds entre les mains d’une notaire aujourd’hui incarcérée. L’arrêt de la Cour d’appel de Rabat, qui infirme une première décision favorable à l’emprunteuse, relance le débat sur les responsabilités bancaires et les défaillances du fonds de garantie des notaires.

Une décision judiciaire qui plonge une cliente dans une situation kafkaïenne

Une cliente marocaine condamnée à rembourser près de 600 000 DH pour un crédit immobilier détourné par une notaire. L’arrêt de la Cour d’appel de Rabat met en lumière les failles du système notarial et du fonds de garantie.

L’affaire aurait pu sembler impossible, et pourtant, elle est bien réelle : une cliente marocaine se voit contrainte de rembourser un crédit immobilier qu’elle n’a jamais reçu. La Cour d’appel de Rabat a rendu un arrêt qui bouleverse totalement le jugement de première instance. Alors que le tribunal avait, dans un premier temps, reconnu la responsabilité de la banque pour avoir débloqué les fonds avant la finalisation des actes notariaux, la cour a choisi une lecture radicalement différente du dossier.

Lors de l’audience du 26 novembre, les magistrats ont estimé que l’emprunteuse demeurait débitrice envers l’établissement bancaire, même en l’absence de réception effective des fonds. Ils l’ont ainsi condamnée à payer 587 369,31 dirhams, assortis d’intérêts, avec la menace de la contrainte par corps en cas de non-paiement. Cette décision plonge la cliente dans une impasse financière et psychologique, assimilée pour elle à une véritable double peine.

Une notaire condamnée pour détournement, mais une cliente tenue pour responsable

Le cœur de l’affaire repose sur la fraude commise par la notaire en charge de l’opération immobilière. Celle-ci a été reconnue coupable d’abus de confiance pour avoir détourné l’intégralité du montant débloqué par la banque. Elle purge actuellement une peine de six ans de prison, mais cette condamnation n’a pas suffi à exonérer la cliente de sa dette bancaire.

Ce cas met en lumière une faille structurelle : même lorsque les fonds sont détournés par un intermédiaire légal comme un notaire, l’emprunteur reste, aux yeux de la banque, redevable du crédit. Les responsabilités se renvoient, mais la victime directe se retrouve au centre du cyclone.

Les limites du fonds de garantie des notaires, un mécanisme sous tension

Cette affaire réactive le débat autour du Fonds de garantie des notaires, censé indemniser les clients lésés en cas d’insolvabilité du professionnel mis en cause. Malgré des réserves financières atteignant près de 500 millions de dirhams en 2023, l’accès à ce mécanisme reste long, technique et semé d’embûches.

Pour que l’indemnisation soit possible, il faut obligatoirement un jugement définitif, passé en force de chose jugée, ainsi que la preuve de l’insolvabilité totale du notaire. Ces deux étapes, souvent interminables, conduisent dans la pratique à un gel des indemnisations pendant plusieurs années. Résultat : des clients déjà victimes d’une fraude se retrouvent sans solution immédiate et avec des dettes colossales.

Vers une réforme du système pour éviter de nouvelles injustices

Face à la multiplication des affaires similaires, le Conseil national de l’ordre des notaires travaille actuellement sur une réforme profonde du système. Parmi les pistes envisagées figure l’instauration d’un remboursement rapide, basé sur une expertise judiciaire et un rapport professionnel. Ce mécanisme permettrait d’indemniser les victimes sans attendre l’aboutissement de tous les recours et procédures, parfois étalés sur plusieurs années.

Une telle évolution offrirait une véritable bouffée d’oxygène aux clients floués et permettrait d’éviter que des situations dramatiques, comme celle de cette cliente condamnée à rembourser des fonds qui se sont évaporés entre les mains d’un notaire indélicat, ne se reproduisent.

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