jeudi, novembre 13, 2025
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Les vraies raisons de la libération de l’otage Boualem Sansal

🔍 Les véritables raisons derrière la libération de l’écrivain Boualem Sansal

Officiellement présentée comme un «geste humanitaire», la libération de l’otage Boualem Sansal cache en réalité un enchevêtrement de motivations politiques, diplomatiques et personnelles. Fragilisé à la fois sur la scène intérieure et internationale, le président algérien Abdelmadjid Tebboune aurait cédé à une pression combinée de Berlin et Paris, tout en cherchant à préserver sa propre survie politique et médicale.

🏥 Une pression directe de l’Allemagne, conditionnant l’accès de Tebboune à ses soins médicaux

L’élément déclencheur de la libération de Boualem Sansal est d’abord une pression allemande explicite.
Le président allemand Frank-Walter Steinmeier a adressé un communiqué officiel à son homologue algérien, exigeant un «geste humanitaire» : la libération de Boualem Sansal et son transfert en Allemagne pour y recevoir des soins médicaux.

Derrière la diplomatie feutrée du message, le sous-texte est limpide :

Pas de libération de Sansal, pas de soins pour Tebboune.

Car Abdelmadjid Tebboune, souffrant de problèmes de santé chroniques, dépend du système hospitalier allemanddepuis plusieurs années. Il s’y est fait soigner à maintes reprises — notamment en 2020 et 2021 — et devait y retourner une nouvelle fois en novembre 2025.
Le communiqué de Berlin, publié la veille de ce voyage médical, a donc mis le régime algérien dos au mur.

En clair, l’Allemagne a utilisé la santé personnelle du président algérien comme levier diplomatique, imposant la libération de Sansal comme condition d’accès à ses soins.

🇪🇺 Un contexte diplomatique désastreux pour l’Algérie

Cette décision s’inscrit aussi dans un contexte international extrêmement défavorable pour Alger.
La résolution 2797 du Conseil de sécurité de l’ONU (31 octobre 2025), consacrant le plan d’autonomie marocain comme solution réaliste au conflit du Sahara, a représenté une humiliation majeure pour le régime algérien.

L’Algérie, isolée sur la scène internationale, a vu ses alliés traditionnels – la Chine et la Russie – s’abstenir lors du vote, révélant son affaiblissement diplomatique sans précédent.
Face à ce vide d’alliances et à une marginalisation grandissante, Alger cherche désespérément à rétablir des passerelles avec les puissances occidentales, notamment Paris et Berlin.

La libération de Boualem Sansal apparaît alors comme un geste de bonne volonté destiné à regagner un peu de crédibilité et de respectabilité internationale, après une série d’échecs retentissants.

🤝 Une tentative de réconciliation avec la France

La question Sansal a aussi pris une dimension franco-algérienne.
L’écrivain, ressortissant français, est considéré à Paris comme un symbole de la répression intellectuelle en Algérie. Sa détention arbitraire a constitué un point de friction majeur entre les deux capitales.

La France, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a mené un «dialogue exigeant» avec Alger pour obtenir sa libération, en coordination avec l’Allemagne.

Pour Abdelmadjid Tebboune, accéder à cette demande devient donc un moyen de réchauffer les relations avec Paris, au moment où le régime multiplie les signaux d’ouverture :

  • publication d’un message diplomatique de Macron salué comme un triomphe,

  • volonté affichée de rétablir le dialogue bilatéral après des années de tensions,

  • besoin de soutien économique et politique européen.

Ainsi, la libération de Sansal serait moins un acte de clémence qu’un calcul diplomatique, visant à réparer l’image d’un pouvoir isolé et rétablir le contact avec ses interlocuteurs européens.

🧩 Un revirement opportuniste et incohérent du régime

Le contraste entre la violence des propos passés de Tebboune à l’encontre de Sansal et la nouvelle posture «humanitaire» du régime illustre un revirement opportuniste.
Quelques mois plus tôt, le président algérien qualifiait Boualem Sansal de «voleur», «bâtard» (parce que son père est marocain) et «traître», niant même son identité nationale (Boualem Sansal a été emprisonné sous le chef d’inculpation de terrorisme pour avoir seulement dit la vérité sur les amputations territoriales qu’a subit par le Maroc au profit de l’Algérie).

Aujourd’hui, le même pouvoir le décrit comme «écrivain respecté, âgé et malade», éligible à la clémence présidentielle.
Ce changement de ton traduit l’hypocrisie d’un régime acculé, prêt à sacrifier la cohérence politique pour éviter une nouvelle humiliation diplomatique.

⚖️ Une manœuvre de survie politique et symbolique

Enfin, la décision de Tebboune s’inscrit dans une logique de survie personnelle et politique.
Fragilisé par sa santé déclinante, par la désaffection de la population et par l’effritement de son appareil diplomatique, le président algérien cherche à gagner du temps et de l’air.

En libérant Boualem Sansal, il tente de se donner une image d’homme d’État magnanime, capable d’un «geste humanitaire» au moment où son autorité s’effrite.
C’est, au fond, une manœuvre défensive, un acte de communication interne et externe, destiné à adoucir son image et à négocier son maintien dans le jeu international.

🟩 En bref…

La libération de Boualem Sansal n’a rien d’un geste spontané de bonté présidentielle.
Elle est le produit d’un rapport de force diplomatique, d’un chantage médical implicite et d’un calcul politique cynique.
Acculé, affaibli et isolé, le régime algérien tente, à travers ce symbole, de redorer son image et de rétablir le dialogue avec l’Europe, au prix d’un spectaculaire reniement.