mardi, décembre 17, 2024
International

L’Algérie accuse la France de vouloir faire des attentats sur son sol

L’Algérie accuse la France de vouloir faire des attentats sur son sol

L’ambassadeur de France à Alger, Stéphane Romatet, a été convoqué par le ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, sans le moindre communiqué officiel, suite à des accusations graves selon lesquelles les services secrets français recruteraient des terroristes dans le but de déstabiliser l’Algérie. Cette démarche, qui intervient suite à une absence de réaction de la diplomatie française après des accusations très graves diffusées par les porte-paroles médiatiques du régime d’Alger, apparaît comme une tentative désespérée de pousser la France à abandonner son attitude perçue comme indifférente envers l’Algérie. Le récent rapprochement entre le Maroc et la France a ravivé les tensions avec une Algérie déconsidérée et de plus en plus isolée, tant sur le plan régional qu’international.

Cette convocation de l’ambassadeur de France à Alger par le chef de la diplomatie algérienne, a été largement relayée par les médias algériens, dont le très officiel journal gouvernemental El Moudjahid, samedi 14 décembre et dimanche 15 décembre qui cite des sources diplomatiques ont indiqué que « l’ambassadeur de France à Alger, Stéphane Romatet, a été convoqué la semaine dernière  pour lui signifier la ferme réprobation des plus hautes autorités algériennes face aux nombreuses provocations et actes hostiles français envers l’Algérie » ; « ces agissements ne sauraient rester sans conséquences » « L’Algérie avertit ainsi qu’elle ne restera pas passive face à ces attaques incessantes visant sa souveraineté » ; pour « préserver sa dignité, l’Algérie prendra toutes les mesures qui s’imposent pour faire face à ces tentatives d’ingérence » (plus vague, tu meures).

Le ministre algérien des Affaires étrangères a en outre laissé entendre des menaces indirectes à l’encontre de Paris, déclarant à l’ambassadeur français que l’Algérie « n’acceptera plus les pratiques et les actes de chantage » émanant des autorités françaises, y compris des lobbys et des factions d’extrême droite qui soutiendraient ces pratiques. Selon le journal Al Khabar, le ministre a précisé que l’Algérie se réserve pleinement le droit de répondre si ces actions hostiles perdurent, les qualifiant de « gestes inamicaux » et d’« actes hostiles » à l’égard du pays.

L’intensité de la réaction algérienne se reflète dans les titres alarmistes des médias locaux. L’Expression a parlé de « Dernière sommation ! », El Moudjahid a évoqué une « sévère mise en garde d’Alger », et Al Khabar a titré « L’Algérie prévient Paris : la patience a des limites », des messages clairs destinés à « faire pression » sur la France pour qu’elle modifie son approche envers la politique du régime algérien.

Ces accusations interviennent après la diffusion, (le 7 décembre), sur la télévision publique algérienne (ENTV) et la chaîne publique d’informations en continu (AL24), d’une prétendue confession de Mohamed Amine Aissaoui, un ancien terroriste de Daech. Ce dernier, qui aurait été formé en Syrie et en Irak, a affirmé dans un programme intitulé « Échec au complot, les aigles de l’Algérie victorieux ! », que, en 2022, il avait été contacté par ARTEMIS, une organisation française de lutte contre la radicalisation. Il aurait alors été mis en relation avec un diplomate français basé à Alger, nommément cité, qui se serait révélé être un agent de la Direction générale des services extérieurs français (DGSE).

Dans ses déclarations, l’ex terroriste a assuré que l’agent de la DGSE lui aurait demandé de « constituer un groupe terroriste » avec d’autres anciens détenus à Alger, en vue de « planifier des attentats » sur le sol algérien. Tous les médias à la botte du régime algérien ont glorifié les services de renseignement algériens pour avoir déjoué le « complot français ». L’Algérie accuse donc la France de tenter de recruter des terroristes pour s’attaquer à la stabilité du pays, un récit (peu crédible, il faut l’avouer) qui a été largement exploité pour alimenter l’hostilité envers la France… qui n’a pas du tout réagit à ces graves accusations par voie de presse, une démarche très loin des us et coutumes diplomatiques.

Les « aveux » (qui ressemblent à une mise en scène) de l’ancien terroriste interviennent dans un contexte régional particulièrement tendu, notamment après la chute du régime de Bachar al-Assad en Syrie. Cette évolution a renforcé les craintes du régime algérien, qui redoute un isolement international encore plus accru qu’il ne l’est déjà, et un affaiblissement interne semblable à celui de son ex allié, le régime syrien déchu. Les autorités algériennes sont très préoccupées quant à la pérennité de leur pouvoir.

L’ampleur de la réaction algérienne et la virulence des accusations (non assumées, car non officielles) à l’encontre de la France semblent avant tout destinées à maladroitement forcer le gouvernement français à réagir. Cette démarche vise à secouer l’indifférence de la France (perçue comme une mauvaise mère ?) envers les préoccupations de l’Algérie (en pleine crise d’adolescence ?).

Derrière cette hystérie apparente, l’Algérie semble également chercher à conjurer un sort semblable à celui de la Syrie de Bachar al-Assad. En effet, le régime algérien est de plus en plus préoccupé par l’idée qu’une déstabilisation intérieure ou une pression extérieure puisse entraîner un effondrement politique similaire à celui du régime syrien qu’il a soutenu… jusqu’à sa chute. Dans ce contexte, les accusations farfelues contre la France (dont le Maroc est habitué depuis très/trop longtemps) servent également à renforcer l’idée que l’Algérie est constamment menacée par des forces extérieures et, comme d’habitude, à détourner l’attention de ses propres défis internes et affaires intérieures.