jeudi, septembre 19, 2024
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Hausse du nombre de migrants clandestins algériens en Espagne

Hausse du nombre de migrants clandestins algériens en Espagne

La route migratoire algérienne : une crise silencieuse mais croissante
Alors que l’attention des médias se concentre souvent sur les flux migratoires en provenance d’Afrique de l’Ouest vers les îles Canaries, une autre route, moins médiatisée mais de plus en plus empruntée, connaît une hausse significative : la route migratoire algérienne vers l’Espagne. Entre janvier et août 2024, près de 8 000 migrants algériens ont débarqué sur les côtes espagnoles, un chiffre révélateur de l’aggravation de la crise sociale et économique en Algérie.

Une jeunesse algérienne en fuite
Malgré les discours triomphants du président Abdelmadjid Tebboune sur les succès de son mandat, un indicateur alarmant vient contredire cette narration : l’augmentation constante du nombre d’Algériens cherchant désespérément à fuir leur pays. Ce phénomène touche particulièrement les jeunes, souvent diplômés, qui se sentent piégés dans une situation de chômage et de manque de perspectives. Nombreux sont ceux qui, face à cette impasse, n’hésitent pas à risquer leur vie en tentant de traverser la Méditerranée pour rejoindre l’Espagne, souvent avec pour objectif final la France.

Ce phénomène concerne non seulement des jeunes, mais aussi des familles entières, démontrant à quel point le malaise social est profond en Algérie. Malgré les ressources naturelles abondantes du pays, notamment gazières et pétrolières, les opportunités économiques demeurent rares, poussant une partie de la population à chercher un avenir meilleur en Europe.

La route algérienne : un trajet de plus en plus fréquenté
Bien que les projecteurs soient souvent braqués sur les naufrages tragiques en route vers les îles Canaries, la « route migratoire algérienne » vers l’Espagne devient un axe clé pour les harraga (migrants clandestins) en quête d’une vie meilleure. Selon un rapport de RFI, cette route correspond principalement aux départs depuis les côtes algériennes, notamment à partir des villes d’Alger, Oran, Mostaganem et Chlef. Les points d’arrivée se trouvent souvent sur la côte est de l’Espagne, à Almeria, ou plus au sud, vers Murcie, Alicante, et même Ibiza dans les Baléares.

Cette proximité géographique entre l’Algérie et l’Espagne, associée à un relâchement des contrôles côtiers du côté algérien, a contribué à l’augmentation des tentatives de traversées. Les migrants utilisent des embarcations légères, notamment des pateras en fibre de verre, équipées de moteurs de 40 à 60 chevaux, capables de transporter bien plus de passagers qu’elles ne sont conçues pour accueillir. En moyenne, ces embarcations surchargées contiennent jusqu’à 20 personnes, bien que leur capacité théorique soit de moitié.

Le coût d’une traversée périlleuse
Pour ces traversées clandestines, les migrants doivent débourser dans les 3000 euros en moyenne pour une place à bord des pateras. Cependant, certains optent pour des moyens de transport plus rapides, comme les go fast — des embarcations à grande vitesse généralement utilisées pour le trafic de drogue. Ces go fast, bien que coûteux (le prix du passage pouvant atteindre 8 000 euros), offrent une traversée plus rapide et moins risquée, réduisant les chances d’être interceptés par les garde-côtes espagnols.

Un phénomène en hausse constante
Les statistiques fournies par l’ONG Acnur montrent une nette augmentation des arrivées de migrants algériens sur les côtes espagnoles. Entre janvier et août 2024, 8 000 Algériens ont emprunté cette route, contre 10 639 pour toute l’année 2023. Cette progression rapide met en lumière une crise migratoire en pleine expansion. Rien que durant la première semaine de septembre 2024, près de 800 Algériens, dont des femmes et des enfants, ont réussi à atteindre l’Espagne.

Les départs augmentent particulièrement durant la période estivale, lorsque les conditions météorologiques sont plus favorables, ce qui facilite les traversées en mer. Malheureusement, ces voyages périlleux s’accompagnent également de tragédies, avec de nombreux naufrages et des pertes de vies humaines.

Un indicateur d’une crise profonde en algérie
Cette recrudescence de la migration clandestine n’est que le reflet d’une pression sociale croissante en Algérie. Le pays, malgré ses vastes ressources naturelles, ne parvient pas à créer un environnement économique dynamique capable de retenir sa jeunesse. L’absence de perspectives, combinée à une gouvernance critiquée, pousse de nombreux citoyens à voir dans l’Europe une échappatoire à leur situation désespérée.

Les médias algériens rapportent que jamais le pays n’avait connu un tel flux de départs clandestins depuis la fin du Hirak, le mouvement de contestation populaire qui avait secoué l’Algérie en 2019. Ce regain de migration s’explique par la frustration grandissante face au manque de réformes et à l’incapacité du gouvernement à améliorer les conditions de vie.

Une route de plus en plus fréquentée en Afrique du Nord
Alors que la surveillance accrue du détroit de Gibraltar a réduit les tentatives de migration clandestine depuis le Maroc, la « route algérienne » est devenue l’un des principaux axes migratoires de la région. Contrairement au Maroc, où les autorités ont renforcé les mesures de contrôle, l’Algérie semble avoir relâché ses efforts pour endiguer ces départs, contribuant ainsi à l’augmentation du nombre de tentatives.

En bref…
La « route migratoire algérienne » incarne une crise humaine et sociale en pleine expansion. Face à l’incapacité du gouvernement à offrir des perspectives d’avenir à sa population, de plus en plus de jeunes, mais aussi des familles entières, se tournent vers la Méditerranée en quête d’une vie meilleure. Cette situation, exacerbée par le désespoir et le manque de réformes économiques structurelles, laisse présager une poursuite de cette tendance migratoire, à moins d’une transformation radicale des conditions socio-économiques en Algérie.




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